L’inactivité : une question bien embarrassante

Vous appartenez au groupe de personnes qui ne tiennent pas en place ? Vous planifiez votre journée même en vacances, car vous détestez par-dessus tout ne rien faire ? Vous trouvez qu’une sieste le week-end est – franchement – une perte de temps ? Qu’inviter des amis, c’est bien, mais pendant ce temps, personne ne fait votre travail (si, si, pas de lutins ou de bonnes fées à l’horizon…, et en plus, vos amis ne sont pas pressés de partir…). Eh bien ! bienvenue dans le club très fermé des gens qui détestent ne rien faire ! Et, mauvaise nouvelle ! L’âge a tendance à accentuer le phénomène (si, si, croyez-moi, j’ai de la bouteille en la matière). Maintenant que vous êtes entré.e (vous avez certainement vu de la lumière), il serait dommage de repartir tout de suite, même si vous n’avez pas de temps à perdre ! (teuh, teuh, teuh, je connais la chanson) :0)).

Installez-vous confortablement dans votre fauteuil et pendant quelques minutes, ne faites rien, ou presque. Je sais, c’est compliqué !

Pour les autres, qui croyaient avoir ici des astuces pour traînasser, lézarder, flemmarder, compatissez sur notre volonté inflexible à refuser la paresse. Alors ? Est-ce si compliqué de ne rien faire ?

Ne rien faire : une journée bien spéciale

Aujourd’hui, j’ai pris une bonne résolution : c’est décidé, je passe la journée à ne rien faire. NE RIEN FAIRE ! Glandouiller, flemmarder, buller, des mots que je n’aurais jamais pensé prononcer. La tête sur l’oreiller, je fixe mon radio-réveil qui clignote furieusement. Le chiffre 7 pulse comme s’il voulait sortir de l’appareil où il se trouve enfermé. À cette heure-là, je suis sur le pas de la porte, prête pour une nouvelle journée de travail.

Le soleil inonde la chambre, comme pour m’inviter à sortir du lit. Je résiste, bien décidée à rester là le plus longtemps possible. Je m’étire, bâille, heureuse d’avoir pris cette bonne résolution. Pour une fois, je n’ai rien planifié. Je ferme les yeux, déterminée à me rendormir. Dehors, les voitures passent. Un klaxon retentit. Un bus s’arrête. La rue s’anime, pleine de vie. J’ouvre un œil.

7 h 05. Je le referme dans l’espoir de retrouver le sommeil.

7 h 10. J’entends la voisine qui sort sa poubelle. Je ne la connais pas, même après dix ans dans cet immeuble. Je pars tôt et rentre tard.

7 h 15. Je m’assois et contemple mon plafond, essayant de me rappeler la dernière fois où j’ai parlé à un de mes voisins… Une fois, peut-être deux ? Je me rallonge, tente de me rendormir. C’est le moment que choisit Gaston pour sauter sur le lit, probablement inquiet de m’y voir traînasser. Il s’approche, pose sa patte sur mon visage en miaulant. Je soupire et me retourne, tout en le chassant d’un revers de main. Est-ce que je viens l’embêter quand il dort ? J’essaie de me détendre en pensant à toutes les choses plaisantes que je vais pouvoir faire aujourd’hui et que je ne fais jamais habituellement : prendre un bain, préparer un déjeuner gargantuesque, me promener dans le parc où je n’ai jamais, ne serait-ce, mis un orteil. La sonnerie du téléphone retentit, s’arrête, reprend.

7 h 30. Je soupire et sors de mon lit en fulminant, bien résolue à le quitter pour le canapé du salon. Mettre la cafetière en route est au-dessus de mes forces, malgré ma furieuse envie de caféine. Le café est mon rituel matinal. Après une tasse bien noire, je pars au travail. Je secoue la tête, furieuse d’avoir pensé au boulot, et m’approche du canapé. J

e jette un regard torve sur la table basse du salon où des rapports, des graphiques s’amoncellent dans un joyeux désordre. Un post-it vert fluo dépasse d’un dossier et attire mon attention. « Urgent ». Le mot danse devant mes yeux. Je feins de l’ignorer en me jetant sur ma bouée de sauvetage…THE canapé. Du pied, je fais tomber rapports, planning, agenda de la table basse. Le vide m’apaise. Je cherche des yeux la télécommande de la télé, essayant de me souvenir de la dernière fois où je l’ai posée… il y a de cela… des lustres sans aucun doute.

Une blonde platine à la poitrine avantageuse se dispute avec un homme à la carrure impressionnante sur son lieu de travail. « Teddy, hurle-t-elle, tu m’as trompée avec ta secrétaire… »  Sur la chaine suivante, une présentatrice, brune, cette fois, présente un ordinateur portable, léger, et…  J’éteins la télé, furax. Tout me rappelle que je ne suis pas au travail.

7 h 45. À cette heure-là, je suis déjà plongée dans la lecture de mes nombreux courriels.

Stop ! Je cligne des yeux pour éloigner l’image tentatrice. Pourquoi ne pas lire un roman ? Voilà une bonne idée. Je me lève et me dirige vers la bibliothèque. Grave erreur ! Les rapports s’empilent, ne laissant aucune place à un loisir, quel qu’il soit. D’ailleurs, je n’ai pas acheté de livres depuis une éternité. Depuis que j’ai commencé ma vie active.

Un rapport à la couverture rouge attire mon attention. J’essaie de toutes mes forces de ne pas y prêter attention, mais c’est trop tard ! Je connais cette couverture. C’est l’affaire Bernox contre Perbel. Je cherche ce dossier depuis une semaine ! J’ai pourtant regardé partout ! Je le saisis, les mains fébriles. Je jubile à l’idée d’annoncer la bonne nouvelle à mon patron. Où est mon portable ?

7 h 50. J’ai encore le temps de me faufiler dans mon bureau sans que personne ne me voie. Je file dans la salle de bain pour m’habiller en pensant que finalement, ne rien faire, c’est très compliqué.

L’art de ne rien faire s’avère ainsi une notion bien complexe. Et si finalement les Hollandais avaient bien compris que ce concept était la clé du bonheur ? Le niksen (rien en néerlandais), où l’art d’apaiser corps et esprit pendant quelques minutes : contempler les nuages, allongé.e sur le sol, paresser au soleil en sirotant un café. Des petits riens qui, mis bout à bout, nous permettent de recharger nos batteries. Alors apprenons l’art de ne rien faire, nous les perfectionnistes, les travailleurs acharnés, les boulimiques du boulot ! Levons le pied !

Par ailleurs, n’hésitez pas à lire mon autre nouvelle sur l’homme, ce superprédateur.

7 réflexions au sujet de “L’inactivité : une question bien embarrassante”

    • Merci:0) Alors, avant 7h05 et 7h45, cela ne va plus ? ;0) Merci d’avoir testé pour la première fois les commentaires. Ca marche ! :0))

  1. Next time I read a blog, Hopefully it wont fail me as much as this particular one. I mean, Yes, it was my choice to read, however I really believed you would have something helpful to talk about. All I hear is a bunch of whining about something you could fix if you werent too busy searching for attention.

    • Bonjour, on a le droit de ne pas aimer. En fait, c’est à l’origine une nouvelle que j’ai écrite, j’ai juste rajouter une intro et une conclusion pour donner plus de substance. Je ne donnais pas de conseils dans cet article, donc désolée si vous aviez des attentes à son sujet. Mais, votre commentaire me donne une idée de sujet ;0)J’espère que vous trouverez des solutions “pour ne rien faire” :0)

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